LOU

Location:
Paris en plein coeur, Fr
Type:
Artist / Band / Musician
Genre:
Down-tempo
Site(s):
Label:
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La double vie floue de Lou
Par BAYON
Pop . En huit titres ciselés et minimalistes, le troisième album de la chanteuse exhale un lyrisme résolument mélancolique.



Après on verra…, de Lou, est une des plus précieuses et sérieuses propositions musicales du jour - glissée en confidence, nappée, dentelée, bouclée, flottée. «Je danse seule… à l’intérieur en secret, je m’extirpe de la nuit», dit le livret.
D’un désenchantement maniéré à ravir, arrangé et murmurant, flux comme perlé, cela se passe en évanescence. C’est le troisième essai de «musique d’ameublement» satienne de la dame lasse (nom de scène à la ville : Lou, mi-flou, mi-look - de Paris), qui a stabilisé ici, déposé, la formule alambiquée maison. Allégé des orchestrations antérieures, épuré, condensé, réduit, détaché, Et après on verra… est une refondation. Son ultime air est un envoi comme médiumnique à Piaf («c’est plié, abandonné…» prolongeant implicitement le Rien de rien patrimonial) et à BB, via tel «sur la plage aux crustacés», en double invocation majeure joliment brouillée.
Le minimalisme atmosphérique arpégé de service, à base de guitare-voix-orgue-boucles en chambre, peut évoquer, outre le sirtaki (la mandoline d’Egale à moi-même) et le nuancier ambient de Brian Eno, l’oublié Durutti Column (de Vini Reilly), star lymphatique opaque de la new wave Manchester, avec le tombal Joy Division. C’est le même flottement somnambulique, floconnement et grelottement de «la guitare noire»,re re de gorge berceur, voix d’enfant comme on dit «entendre des voix».
Papillonnée. Soit huit propositions poétiques affiliables rock. Tirant à l’autisme tripoté et tricotant, au sens où l’on parlerait, en art contemporain, de body art. En variante arty placentaire de moanin’ blues. Une étrange pâleur répétitive et glossolalique sous les signes croisés de Sophie Calle et Houellebecq (sensation littéraire d’il y a cinq printemps citée en exergue : «Et si je n’ai pas compris l’amour, à quoi me sert d’avoir compris le reste ?» - un peu Marot).
En légende des «alchimies du verbe» distillées en promo, on voit : «Ecrit, enregistré et mixé dans la même pièce.» Ce qui n’est pas mal, ni mal dit. Tel chant (Oceanic Sentiment, l’un des quatre tubes «low fi fille» flous de Lou avec la Prunelle de mes yeux ou D’avril à juillet), mouronne en fredaine papillonnée : «J’étais partie à la nage/ Là où l’on n’a plus jamais pied/Plus on avance en âge/ Moins on a peur de couler…» Ce qui est encore remarquable, et par quelque association d’idées nébuleuse, évocateur du feu dessinateur ligne blanche (comme on dit «ligne claire») Pascal Doury, «homme au bras d’or» du Stabilo, associable à une autre Lou…
Craquements. La nôtre, servie par ledit Le Loup (Mahut), dodeline et opère mezzo voce, filant une ferveur de pluie «au pétillement fade de limonade», en autarcie fêlée. Comme file le temps sur elle (dont elle se voile en photo, chiffonnée, floutée). Mais quelle grâce à la clé ; cela vaut la peine de se dissiper, de périr, ensablée, en fille de Loth salée. «La douceur qui arrive/ Dans le ciel de Paris/ Chaque fois me chavire/ Tant la douleur est vive…» Là, c’est Duras l’ivrogne devineresse qui s’entend, avec la programmation scintillante, en chambre de réanimation comatée. En livret, une photo de saison réplique d’ailleurs en noir et blanc fixatif l’illustration couleur de couverture de Des hauts et des bas 2002 (le manifeste Lou est daté, lui, de 1998), rappelant une Claire Denis d’Afrique fantôme, comme la musique et ses «craquements d’écorce» de douleurs exquises la poliomyélite d’antan. La Côte sauvage répond aux vues effacées de limbes chantants, entre Tous les jours et Plus rien qui vient. C’est que la disparition est dans l’air. En prélude, «Comment vivre ?» ; bribes de réponse: «Ni échec ni victoire», Je n’ai rien fait, «Se souvenir de l’amour vide»… ; total, de «Tout me ramène à l’oubli» en «Je fais un dernier tour» : Plus rien, donc.
Ravissement, étrangeté, absences, mort volontaire. On la pressent au bout du fil prêt à rompre de cette inspiration diaphane méticuleuse préservée contre vents et marée.
C’est menu et éthéré, d’une hystérie tatillonne idéalement confinée. A fuir dans la vie ; parfait à l’œuvre. Rien de mieux - écrit, retenu, vanité chantée - pour l’heure. Saluons la sortie de scène : «D’accord pour la vie/ D’ailleurs pour la mort aussi/ C’est plié, abandonné/ […] Plus rien/ Plus de corps, plus d’écran/ Plus rien/ Dehors, dedans…» Tout s’estompe en suspension de souffle, soupirs, le dernier ; sons de sablier et sirène, une âme à la mer, on met en panne, l’esquif court sur son erre.
Photo Jérôme Bonnet
LOU En concert à l’Alhambra, 75010. Ce soir, 20 h (avec Rachid Taha, Jacques Higelin…) au profit du centre André-Malraux de Sarajevo. Et le 2 juin au Zèbre (avec Vérone), 75011. CD : ET APRÈS, ON VERRA… (ADCA).
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