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9ch - "COURAGE ON LES AURA!" VU PAR GILLES PORTE (REAL: QUAND LA MER MONTE)
10 Avril 1916, au plus fort de la bataille de Verdun, le général Pétain fit paraître un ordre du jour destiné à entretenir le moral et la volonté de « tenir » de ses soldats : « Le 9 Avril est une journée glorieuse pour nos armées.Les assauts furieux des soldats de Kronprintz ont été partout brisés. Fantassins, artilleurs, sapeurs, aviateurs ont rivalisé d’héroïsme. Les allemands attaqueront sans doute encore. Que chacun travaille et veille pour obtenir le même succès qu’hier… COURAGE, ON LES AURA ! » Cette dernière phrase devint célèbre. Quelques mois plus tard, quand il s’est agit de compter les morts à cette même bataille, les chiffres étaient terribles : 163 000 soldats français d’un côté, 143 000 soldats allemands de l’autre… Mars 2007, pas certain, lorsque que MATHIEU et PIERRE-LUC FAUNY choisissent ensemble le titre de leur deuxième album qu’ils fassent allusion ici à l’une des batailles les plus inhumaines à laquelle l’homme s’est livré. Si « les poilus » étaient encore nombreux, en cette année électorale, alors faudrait-il que je m’attende sans doute à une levée de baïonnettes du fond des tranchées pour oser ainsi dresser ce type de parallèle. Seulement voilà, à l’heure où seuls trois poilus résistent, c’est « à poil » que je vous demande d’écouter le dernier disque des frères Fauny. « A poil », parce que c’est ainsi qu’ils l’ont enregistré, chez eux, en Normandie, si loin des formatages ambiants qui déroulent aux heures de grande écoute. Pierre-Luc et Mathieu me font penser à Hervé Leforestier, un artiste peintre qu’ils admirent et qui passe son temps , dans une rue, près de chez eux, à peindre des confettis en bleu, blanc ou rouge. « Quand je peins, c’est des couches et des couches… Parfois ça déborde un petit peu… Je pourrai me contenter de prendre des gommettes déjà peintes mais bon… Alors ça prend du temps … Peindre des confettis, sans en foutre à côté… Ca calme »… Comme Hervé Leforestier, Mathieu et Pierre-Luc passent des couleurs sur du noir : « du bleu qui couvre » à condition d’y passer quatre couches… Du blanc qu’ils rajoutent à du blanc, histoire de texture sans doute et du rouge… Comment faire autrement ? Plutôt que de « paraître », Mathieu et Pierre-Luc « sont »… J’ai lu quelque part qu’ils étaient « demi-frères », moi, qui suis « faux jumeaux » comme s’il s’agissait de n’être pas tout à fait vrai. Ne vous trompez pas, pas de place dans le dernier album des frères Fauny pour la demi-mesure: Mathieu et Pierre-Luc sont bien « entiers » ! Est-ce si fréquent aujourd’hui? L’autre jour, Valentin, un enfant de 6 ans, me téléphone pour me dire que le baobab en plastique que je lui avais offert a « fait une feuille ». Sans doute venait-il d’écouter 9CH lui aussi… Faites l’essai… Laissez rentrer chez vous ces deux mecs qui déclarent « essayer d’exister » (sic) dans ce drôle de paysage et fermez les yeux… Vous découvrirez alors comment, loin des modes et des tendances, Mathieu et Pierre-Luc passent des couches et des couches de couleurs tout en préservant des fissures parce qu’ils ont compris depuis bien longtemps que seules les failles permettent à la lumière de passer. Gilles Porte
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